UN PEU DE TOUT... BEAUCOUP DE RIEN
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Les Borgia : Une famille de la Renaissance
Près de Valence, réside une famille d’honnêtes travailleurs, généreux, vertueux, croyant dans la religion romaine : les Borja. Le cousin Alonso (ou Alfonso), né en 1378, évêque de Valence est également secrétaire du roi Alphonse V d’Aragon et de Sicile. Bien qu’il soit prélat, il organise déjà des soirées où l’on parle d’amour et où l’on profite de la bonne chair.
Dans les années 1380-1400, deux papautés se disputent la tiare : Benoît XIII à Avignon et Urbain VI à Rome. A la mort de Benoît XIII d’origine aragonaise, le roi Alphonse décrète que le prochain pape s’installerait à Rome et non plus à Avignon. Alonso Borja devient cardinal et le roi le pousse à obtenir la tiare, en lui faisant tout de même un beau sermon : changer son nom en Borgia, changer sa vie en éliminant toutes les femmes autour de lui, rétablir l’ordre car dans Rome résidait la loi du plus fort, s’éloigner des grandes familles Orsini et Colonna, enfin consacrer son temps à l’église... La machine est en route.
Enfin, en 1455 c’est le triomphe : Alonso Borgia est élu pape sous le nom de Calixte III, premier pape d’origine espagnole. Au lieu de suivre les conseils du roi d’Aragon et de mener une vie consacrée à l’Eglise, Calixte III poursuit sa vie délurée dans le vice, offrant des biens à ses fils illégitimes ou ses neveux adoptifs (une église et les revenus s’y rattachant pour l’un, le poste de cardinal chancelier pour Rodrigue le second). Tout cela déplaisait bien évidemment aux grandes familles, l’ordre ne régnant plus dans Rome, il y a de plus en plus de brouilles de toutes parts, de meurtres, d’empoisonnements.

Rodrigue Borgia, futur pape Alexandre VI
Rodrigue Borgia nait en 1431, et profite du système dès l’âge de vingt quatre ans en devenant cardinal, puis vice chancelier du pape. Il aspire aussi au pouvoir et espère déjà devenir un jour le pape. Calixte III s’éteint en 1458 et Rodrigue manipule les cardinaux et le conclave afin d’élire le pape suivant Pie II, cardinal de Sienne, pâle, chauve, maladif…paraissant vingt ans de plus. Gardant ses fonctions, il aide Pie II dans sa lutte contre l’empire ottoman et malgré cela, les Borgia sont haïs par les romains. La ville ne ressemble plus à rien, aucun jour ne passe sans complots, intrigues et meurtres. Le seul but de Rodrigue est de s’enrichir et d’obtenir la tiare, tout moyen est bon…
Envoyé en mission à Sienne, Rodrigue passe du bon temps et se fait sermonner à son retour…un prélat ne passe pas son temps au plaisir. Il doit se modérer. Pie II parti en croisade, meurt en 1464. Il est grand temps de rentrer à Rome pour élire un autre pape …ami : Pietro Barbo, cardinal de Venise sous le nom de Paul II. En remerciement, Rodrigue reçoit une grande abbaye et le duché d’Albano et des ducats.
Il peut ainsi s’installer dans un bâtiment tout près du château de Saint Ange qu’il transforme en palais. C’est là qu’il accueille un jour de 1470 Vanozza Cattanéi, une jeune fille rencontrée à Sienne. Déjà mariée à un époux indulgent contre rémunération, Rodrigue va devenir l’heureux père de quatre beaux enfants : César en 1475, Jean en 1476, Lucrèce en 1480 et le petit dernier Geoffrey en 1481.
Paul II meurt de la peste en 1471 et le cardinal Francesco della Rovere prend le nom de Sixte IV, encore un ami de Rodrigue. Ce pape tente de rétablir l’ordre mais l’entente entre les deux hommes devient exécrable suite à la conspiration des Pazzi où Sixte veut anéantir les Médicis (à cette occasion le second fils de Laurent le Magnifique est tué). De son côté, Rodrigue mène joyeuse vie auprès de Vanozza mais également d’autres maitresses, s’adonne à la chasse, à des réceptions et des orgies. Sixte IV disparait en 1484. Rodrigue pense de plus en plus à la tiare…mais il fait une erreur en voulant s’allier aux Orsini et laisser tomber les Colonna ! Pour rattraper le coup, il s’allie avec le cardinal De La Rovere pour mettre en place un nouveau pape : le cardinal Cibo prenant le nom d’Innocent VIII …ce nouveau pape est encore plus débauché que les autres…après lui, Rodrigue est maintenant persuadé qu’il deviendra pape, parce que les Orsini et les Colonna s’entretuent. Et voilà qu’Innocent VIII agonise en milieu d’année 1492 ! Rodrigue est heureux…surtout avec sa nouvelle maitresse : Giulia Farnèse a quinze ans…Rodrigue soixante ans.
Mais il faut tout de même penser au conclave. Rodrigue fait acte de repentir devant tous, personne ne le croit, surtout qu’un autre concurrent se présente : un Sforza, le frère de Ludovic le More. Rodrigue achète des voix en donnant des palais aux uns, des monastères aux autres. Au premier tour, il ne récolte aucune voix. Ce n’est qu’au troisième tour que finalement, Rodrigue est élu pape sous le nom d’Alexandre VI. Plutôt un Borgia qu’un Sforza …
Réagissant comme tous les précédents papes, Alexandre VI commence par installer toute sa famille aux bons postes : évêques, capitaine des gardes, et bien sur, marie sa fille en fonction de ses intérêts, avec Giovanni Sforza, il s’occupe d’abord de ses enfants, Dieu passe après. Florence est en ébullition : Laurent le Magnifique est mort, le moine Savonarole fait des prédications et ne prêche que pour son succès et son salut éternel, pas pour l’église. Il va même jusqu’à écrire que le pape n’a jamais été ni chrétien, ni ecclésiastique.
Amassant des biens, profitant des caisses du Vatican, bafouant les principes chrétiens, aspirant à devenir le maître du monde, Alexandre VI suscite bien des jalousies, c’est la guerre un peu partout : Charles VIII envahie Milan autour de 1495. Mais à sa mort, le nouveau roi de France a besoin d’Alexandre VI pour annuler son mariage avec Jeanne de France et se remarier avec Anne de Bretagne. En échange de quoi, Louis XII s’allie avec Rome. Mais à la fin du siècle, il reviendra occuper le duché de Milan.
Vieillissant, ne faisant pas très attention à sa santé, Alexandre VI est pris de malaise lors d’un grand diner. Il soupçonne l’empoisonnement, mais César l’accompagnant est dans le même état. Plus âgé, Rodrigue a du mal à s’en sortir…le 18 août 1503, il disparait, après une crise d’étouffement.

Lucrèce, la fille bien aimée
Lucrèce, entrée dans l’histoire par sa soit disant relation d’inceste avec son frère et ses m½urs dissolues à cause de Victor Hugo, et dépeinte comme la plus grande et la pire des courtisanes de Rome, est la préférée des enfants d’Alexandre VI. Elle fut surtout une victime. Recevant une éducation digne d’une princesse, elle se réfugie souvent au couvent des dominicains de San Sisto à Rome.
Elle est mariée une première fois à Giovanni Sforza en 1493 alors qu’elle n’a que treize ans, mais ne veut plus de ce mariage, son mari étant plus ou moins impuissant, Lucrèce demande une annulation en bonne et due forme émise par le pape. Recluse encore une fois au couvent de San Sisto, elle s’éprend d’un valet de son père…en attendant la prononciation de son divorce. Enceinte de ce valet (le bébé nait en mars 1498, reconnu par César le frère comme étant son fils ! puis par Alexandre VI comme étant le sien ave Giulia Farnèse…la rumeur courre toujours : ce sera l’enfant du pape et de sa fille !!!), il faut lui trouver un mari d’urgence.
Lucrèce, utilisée aux fins des Borgia pour leur accession aux pouvoirs et propriétés, est mariée à Alphonse d’Aragon, duc de Bisceglia, beau comme un dieu, qu’elle aime vraiment. Auprès de lui, elle s’entoure d’artistes tels Michel Ange, Bramante l’architecte qui va dessiner la grande colonnade du Vatican. Elle peut enfin passer une vie tranquille et pleine d’amour auprès de son mari, accoucher d’un enfant nommé Rodrigue en 1499, sans crainte, César étant adulé en France… jusqu’à ce que César décide de rentrer en Italie accompagnant Louis XII qui veut conquérir Milan et Naples.
César est jaloux et ne supporte pas ce bonheur, encore moins avec un napolitain. Il profite du fait que Lucrèce est au chevet de son père, pour « s’occuper » de ce beau-frère. Après un court diner au Vatican, Alphonse rentre seul dans son palais. Sur le chemin, il se fait attaquer, frapper et laisser pour mort. Nous sommes en juillet 1500. Un mois plus tard, Alphonse se rétablit petit à petit…Mais César est insatisfait, il n’aime pas les choses non achevées. Il achève la besogne le 18 août. Alphonse est définitivement mort. Lucrèce ne supportant pas l’attitude de son père qui protège le fils, ne supportant plus son frère, s’exile à Nepi…mais quelques mois après, César vient lui proposer un troisième mari ! Alphonse d’Este, duc de Ferrare.
Douce, résignée elle se remarie pourtant. Cette maison était opposée au mariage avec une Borgia (le pape Alexandre et le Diable : c’était pareil), encore plus d’une femme délurée (toujours la rumeur), mais comme César est en faveur à la cour du roi Louis XII, que ce même César devenait l’un des princes le plus riche de l’Europe, le duc Hercule accepte le mariage de son fils. Seul bémol, la dote de cent mille ducats d’or avait été falsifiée, la moitié des pièces remplacées par des fausses. Il fallut une semaine pour résoudre ce problème. Finalement, le mariage a lieu en hiver 1501, avec des somptueuses fêtes et comme toujours des orgies, Lucrèce quitte définitivement Rome pour le duché de Ferrare. Elle ne reverra plus son père.
A la mort de son père, Lucrèce peut enfin devenir duchesse d’Este, et ne plus être seulement la fille du pape. Très appréciée, c’est une duchesse délicate qui s’occupe des pauvres et devient protectrice des arts. Elle meurt en 1519, à trente neuf ans, d’un empoisonnement du sang.

César, « le Prince » de Machiavel
De son enfance, nous ne savons pas grand-chose de César de Borgia, si ce n’est qu’il est destiné très jeune à l’Eglise, sans que cela ne lui plaise. Evêque de Pampelune, il remercie Dieu le jour de l’élection de son père au poste de pape, en ayant en tête de négocier avec lui pour redevenir laïc. Avide de pouvoir, ne voulant pas d’obstacle entre lui et son père, il fait assassiner son frère Jean, duc de Gandia que l’on retrouve dans le Tibre avec dix neuf coups de poignards dans le corps en 1497. Il n’y a pas de place pour deux garçons, surtout que Jean est plus intelligent et moins cupide que son frère…
Son père juge alors nécessaire de l’envoyer en mission d’ambassade en France. César est heureux, il veut conquérir un royaume. Portant au roi Louis XII l’accord de nullité de son mariage afin d’épouser Anne de Bretagne, il arrive près de Chinon, avec toute son escorte, habillé, doré, donnant l’impression d’un « parvenu », exigeant une princesse de sang royal, alors que le peuple préfère la mesure et la sagesse. Charlotte d’Albret fait office de princesse (la Navarre avait besoin d’or) et César est fait duc de Valentinois. Le mariage est célébré en 1499 en très grande pompe, la pauvre Charlotte recroquevillée dans un coin, César triomphateur.
Devenu duc de Romagne, après avoir gagné des batailles et des villes, il rentre à Rome et y reste pendant l’année 1500 pour remplir ses poches de ducats, pour participer aux fêtes grandioses où les cardinaux et le pape s’y mêlent joyeusement. Guerrier, il veut régner, être seul au monde et se débarrasse de l’amant de sa s½ur (le valet d’Alexandre VI), puis de la suivante… enfin, jaloux du second mari de sa s½ur, il le regarde d’un ½il noir et le fait tuer. César est satisfait, il ne reste plus que le pape et lui. Il a tant d’emprise sur son père qu’il peut maintenant commencer à conquérir l’Italie entière. Il fait tuer tous ceux qui s’opposent à lui, et Rome devient une ville invivable, les habitants ne peuvent plus sortir tranquillement, il n’y a que meurtres, assassinats, coups fourrés couverts par le pape, qui ne recule devant rien pour aider son fils.
César renforce son armée, il gagne de plus en plus de ville, mais Ferrare lui manque ! Le mariage de sa s½ur avec le fils du duc Hercule est la solution.
En 1503, peu de temps avant la mort du pape, César est devenu le personnage le plus important d’Italie après Alexandre VI. Il fait toujours disparaître tout ce qui le gêne, le Tibre charrie tous les jours de plus en plus de corps, même des prélats, des évêques, des grands seigneurs en désaccord avec lui mais pour lesquels César s’était fait déclaré légataire universel.
L’ambiance change après la mort d’Alexandre VI, car César ne se sent pas en sécurité dans Rome, malgré son titre de seigneur gonfalonier et capitaine général de l’Eglise. Il faut réunir un nouveau conclave, mais le Vatican est formel : le conclave se réunira uniquement s’il n’y a plus d’hommes d’armes à Rome. Demandant la protection supplémentaire du roi de France, il quitte la ville pour rejoindre sa s½ur Lucrèce à Nepi et attendra six semaines pour revenir à Rome. Bien qu’affaibli César tente de ruser avec le nouveau pape Jules II (Giuliano de la Rovere), mais cette fois, le pape est le plus fort… César se fait prendre. S’il veut quitter Rome, il doit rendre des biens et des villes. Finalement il est capturé et emprisonné. Réussissant à fuir l’Italie, il se réfugie en Espagne, y est pris et enfermé. Encore une fois il s’évade en octobre 1506. Il tente de récupérer quelques biens en quémandant auprès de sa s½ur, puis du roi Louis XII. Ne lui restant plus grand-chose, il se met au service de Jean de Navarre contre Ferdinand d’Aragon. La vie est difficile, lui qui était habitué au faste. Il est finalement tué en 1507 lors de l’assaut d’une petite ville et d’un petit château…