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The Leftovers (Saison 2) - Un drame à la beauté miraculeuse
C'est une histoire improbable, folle et à devenir fou. Un événement incompréhensible, qui nous laisse perdu, hagard, enragé et abattu, le c½ur lourd et le regard vide, en quête d'un signe, d'ici ou d'ailleurs. The Leftovers, sublime drame métaphysique inspiré par le livre éponyme de Tom Perrotta (Les Disparus de Mapleton en français), s'ouvre sur la disparition subite, inexpliquée et inexplicable, de 2% de la population mondiale. Evaporés, enlevés, gommés de notre monde. Ce n'est pas ce mystère qu'elle cherche à comprendre, mais celui de ceux qui restent, leur deuil, leurs blessures, leur relation par le vide avec les disparus, leurs amours, leur tentation du néant. Une ½uvre qui témoigne avec une puissance rare du poids du passé, des peurs, des remords, qui fouille les entrailles les plus sombres de l'existence mais ne cesse de regarder vers la lumière, vers la beauté du monde, malgré tout.

Après une première saison inégale mais déjà capable d'époustouflants instants de grâce, The Leftovers a pris un nouveau départ. Elle s'est débarrassée d'une partie de ses personnages, a quitté Mapleton, la petite ville de l'état de New York où ils vivaient, et a tiré le meilleur partie des relations qui s'étaient tissées entre eux l'an dernier. Moins frontale, moins directement métaphorique du deuil, des déchirements sociétaux que provoquent les catastrophes, toujours aussi mystique mais plus équilibrée, plus cohérente, plus proche encore de ses personnages, cette saison 2 se déroule essentiellement à Jarden, une petite ville renommée Miracle, puisqu'aucun habitant n'a disparu le fameux et tragique 14 octobre. C'est là que Kevin Garvey (Justin Theroux), Nora Durst (Carrie Coon) ou encore son frère le révérend Matt Jamison (Christopher Eccleston) et son épouse handicapée Mary (Janel Moloney) sont venus chercher l'espoir de meilleurs lendemains. D'une forme de paix intérieure. Mais rien n'est aussi simple.

Ouverte sur une hallucinante séquence préhistorique, stupéfiante déclaration d'indépendance et d'ambition, cette saison 2 n'a cessé de monter en qualité. Elle a su resserrer sa densité dramatique en se centrant sur un personnage différent à chaque épisode, quitte à s'éloigner de Jarden de temps en temps. Une leçon retenue de la saison 1, sans doute, où les meilleurs chapitres adoptaient ce point de vue resserré – notamment l'épisode 6, centré sur Nora. Pourquoi John Murphy, le nouveau voisin de la famille Garvey, passe-t-il à tabac ceux qui prétendent qu'il y a des miracles à Jarden ? D'où viennent ses tremblements de terre qui ébranlent régulièrement la ville ? Kevin Garvey a-t-il perdu la tête comme son père, ou est-ce bien un fantôme qui le poursuit ? The Leftovers mêle avec une infinie délicatesse un monde étrange, bien réel mais teinté de fantastique, et des enjeux intimes bouleversants. Même quand elle penche vers le symbolisme et le surnaturel, elle reste toujours profondément humaine.

Rarement une série aura su si intelligemment exprimer les troubles de ses personnages, leur désarroi face à la disparition de leurs proches, leur lutte pour comprendre leurs souffrances, pour se connecter à leurs émotions et à celles des autres, pour construire, pour aimer. Rarement une ½uvre télévisuelle aura su illustrer avec autant de profondeur et d'originalité une si grande diversité de sujets intimes, la famille, l'amitié, la communauté, le mariage, l'amour qui meurt et celui qui nait, celui, conflictuel, entre parents et enfants, ou encore la religion – The Leftovers offre une puissante réflexion sur la notion de foi, en un Dieu, en soi, en l'autre ou en la vie. Si dure soit-elle, pleine de larmes, de cris, de sursauts de violence, cette saison 2 déborde de tendresse et d'espoir. Elle est baignée de lumière, charnelle, colorée, capable de nous faire pleurer de bonheur une minute avant de nous faire pleurer de tristesse. Il a beau s'y passer les choses les plus terribles, The Leftovers demeure une histoire d'une incroyable beauté. Surprenante, dérangeante, capable de nous atteindre au plus profond, et de nous laisser bouche bée, retourné, après chacun de ses épisodes.

Source: http://www.telerama.fr/...