À l’origine, les penny dreadfuls étaient des publications peu chères proposant des histoires horrifiques considérées sordides pour l’époque. Ce n’est certainement pas de cette manière que l’on décrirait la série Penny Dreadful créée par John Logan pour Showtime et Sky Atlantic — qui fut diffusée entre 2014 et 2016.
Bien au contraire. On dirait même qu’elle était raffinée, riche et gothique. Tout débute en 1891 en Angleterre où la mystérieuse Vanessa Ives (Eva Green) recrute le tireur américain Ethan Chandler (Josh Hartnett) pour un travail nocturne. Elle est à la recherche de son amie Mina Harker, en compagnie du père de cette dernière, Sir Malcolm Murray (Timothy Dalton). La disparition de la jeune femme est liée à d’étranges et dangereuses créatures qui rôdent la nuit. Pour retrouver Mina, ils vont devoir en découvrir plus sur les monstres qui peuplent Londres.
Penny Dreadful est une série qui est l’héritière d’une tradition littéraire et qui embrasse cela en rendant honneur à ses racines avec élégance et sophistication. Dans la lignée de ce qu’a fait Alan Moore avec La Ligue des gentlemen extraordinaires, John Logan prend des figures classiques issues de la littérature — telles que Frankenstein et sa créature, Dorian Gray ou encore Dracula — et les associent pour raconter une histoire explorant leurs mythologies respectives, tout en donnant le jour à une autre.
Néanmoins, au c½ur du récit se trouve une création originale qui va totalement s’emparer du show. Brillamment incarnée par Eva Green, Vanessa Ives est une femme mystérieuse attirée par des forces obscures. Complexe et envoutante, la fille spirituelle de Sir Malcolm Murray est à juste titre fascinante pour ceux qui l’entourent et ceux qui veulent s’en saisir.
Les personnes intéressantes peuplent le monde de Penny Dreadful. Aucune ne l’est peut-être autant que Vanessa, mais John Logan prend soin de dessiner des portraits nuancés de Victor Frankenstein (Harry Treadaway) et sa créature (Rory Kinnear), de l’immortel Dorian Gray (Reeve Carney), de l’explorateur Sir Malcolm et son discret allié, Sembene (Danny Sapani), ou encore du tireur Ethan Chandler qui déteste la violence et de l’immigrée Brona Croft (Billie Piper) au destin imprévisible. Le résultat est un drame horrifique qui est avant tout psychologique et étonnamment romantique.
Revisitant des histoires célèbres qu’il intègre dans son propre univers, le scénariste navigue entre l’hommage et l’originalité d’une manière intrigante pour approfondir la notion de monstre. Il questionne son apparence et son essence pour former une réflexion sur l’humanité, entre la cruauté, la souffrance et un soupçon de bonheur.
Progressivement, Penny Dreadful se présente comme une sorte d’hymne à la différence avec ses personnages se battant avec qui ils sont et le monde dans lequel ils vivent pour trouver une place, pour s’accepter et être accepter. Elle en devient par ailleurs une ½uvre inclusive avec un message féministe assez fort.
Tout cela se construit dans un univers sombre qui nous plonge dans le Londres de l’époque victorienne, théâtre d’horreurs qui se révèle être un véritable spectacle pour les yeux. La qualité de la production, des décors aux costumes, est en effet superbe et les choix esthétiques sont toujours impeccablement faits pour sublimer les éléments les plus tragiques de ce récit gothique et romantique.
Sur trois saisons (et seulement 27 épisodes), Penny Dreadful a su captiver avec ses mystères ésotériques, ses monstres violents, un amour de la littérature classique, une touche de poésie, de la romance tragique et une énigmatique héroïne qui fascina de la première à la dernière image. C’est une série à part qui aurait mérité de se poursuivre plus longtemps.