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Romulus, fondateur et premier roi légendaire de Rome
De l’origine troyenne et divine de Romulus à la légende de la louve

Iule, fils d’Enée, héros troyen arrivé dans le Latium après la chute de Troie (env. 1184 avant J.-C.), aurait fondé la ville d’Albe la Longue, non loin de la Rome actuelle. Dans cette lignée, mais plusieurs siècles plus tard, au VIIIe siècle avant J.-C., un certain Amulius, prend le pouvoir par la force au détriment du roi Numitor. Ce dernier avait une fille, Rhéa Silva, qui est aussitôt faite vestale par le tyran, afin qu’elle n’ait pas d’enfants. On présente communément Romulus comme un des jumeaux, avec Rémus, né de Rhéa Silva et du dieu Mars. Les Romains tiennent là l’origine divine de leur cité : Romulus est fils du dieu Mars et de Rhéa Silva, elle-même descendante d’Enée, fils de Vénus.

Les bébés, jetés dans le Tibre par Amulius, qui ne voulait pas que les deux garçons reprennent le trône une fois plus grands, sont finalement sauvés et allaités par une louve, puis recueillis par un couple de bergers. Adultes, les jeunes hommes rétablissent ensuite Numitor le roi légitime d’Albe, et décident de fonder une ville là où le Tibre les avait déposés.

Ces faits sont établis et fixés par des écrits depuis le IIIe siècle avant J.-C., et ont été répandus largement par les écrits de Plutarque dans La Vie des hommes illustres (La vie de Romulus), et de Tite-Live, dans le livre I de son Histoire romaine. Dès l’Antiquité, l’intervention de la louve, assez peu réaliste, est controversée puisque lupa signifie également en latin « la prostituée », renvoyant ainsi au fait que les bébés aient pu être élevés par Larentia, la femme du berger Fautulus, prostituée au surnom de Lupa.


Romulus, fondateur de Rome

Pour fonder leur ville, les deux frères jumeaux consultent le vol des oiseaux pour y voir leur destinée, comme le raconte Tite-Live ci-dessous. Romulus voit en second douze vautours voler au-dessus du Palatin tandis que son frère Rémus en premier n’en a aperçu que six sur l’Aventin. Il est donc décidé que les auspices se sont montrés favorables à ce que Romulus devienne le fondateur de la cité pour avoir vu le double de vautours.

Pour délimiter la nouvelle ville, Romulus, selon une tradition étrusque, trace une enceinte, un sillon, le pomoerium, creusé par une charrue au sommet du Mont Palatin et jure de tuer quiconque franchirait son enceinte. Rémus désobéit, pénètre à l’intérieur de cette limite sacrée et est donc tué par son frère. C’est ainsi que Romulus devient le premier roi de Rome, ville à laquelle il a donné son nom. On est alors en 753 avant J.-C.


Romulus, premier roi de Rome

Romulus est à la tête d’une ville qu’il faut développer et peupler. Il fait citoyen romain tout homme qui vient se réfugier à Rome et qui demande l’asile. Mais il est n'entouré que d’hommes, et se trouve sans femmes. L’histoire de la ville créée par la force et dans le sang se poursuit donc: il faut faire venir des femmes qui pourront enfanter un nouveau peuple. Tite-Live raconte précisément le piège tendu par Romulus à un peuple voisin : les Sabins. Il s’agit de faire venir ces habitants du Quirinal et du Capitole, à des courses de chars, organisées pour eux, en l’honneur du dieu Consus, dieu des semailles. Au signal de Romulus, les Romains capturent les jeunes femmes. Le tableau de Nicolas Poussin proposé ici est une des nombreuses représentations picturales de cet événement légendaire. Le roi sabin Titus Tatius attaque en représailles les Romains, mais cette guerre cesse rapidement à la suite d’une intervention des Sabines, devenues Romaines. La réconciliation des deux rois va au-delà de la paix. Titus Tatius partage avec Romulus cinq ans de règne sur Rome. Romulus épouse l’une des Sabines enlevée, Hersilie, qui était intervenue en faveur de la paix.

Sur le plan politique, Romulus met en place des institutions, dont le Sénat. Le règne de Romulus est aussi marqué par de nombreuses guerres pour gagner des peuples et des territoires. Celle contre les Étrusques en est la plus marquante et la plus longue.

Le poète Ovide raconte la mort de Romulus, un jour qu’il passait ses troupes en revue lors d’un violent orage, sur le champ de Mars et l’apothéose qui aurait eu lieu en 716 avant J-C.

Le roi Numa Pompilius lui succéde.


Romulus, un personnage historique ?

Le personnage de Romulus est donc lié à plusieurs légendes : celle d’Énée, celle de la Louve nourricière, celle de l’enlèvement des Sabines notamment. Et souvent, les recherches archéologiques et scientifiques qui ont tendu à prouver son existence ont été controversées. On entend parler régulièrement de Romulus quand des découvertes sont faites mais des doutes sont régulièrement émis quant aux interprétations proposées.

Ainsi, à la fin des années 1980, une équipe italienne de scientifiques menée par Andrea Carandini, archéologue spécialiste de la Rome antique, travaille sur le Forum, au pied du mont Palatin, dans une zone peu exploitée jusqu’alors : elle découvre une longue et profonde entaille jalonnée de grosses pierres et étudie ces marques laissant penser à un tracé de mur, datant du VIIIe siècle avant notre ère. Pour l’archéologue, il s’agit du pomoerium, c’est-à-dire du fameux « sillon sacré » tracé par Romulus. Cette interprétation a été quelque peu revue. L’archéologue français Alexandre Grandazzi nuance ainsi cette découverte : « Romulus n’a probablement jamais existé mais, avec la découverte du sillon, nous ne pouvons que conclure à l’historicité d’un moment “romuléen” ».

En 2007, c’est le Lupercal, la grotte où la louve aurait allaité les deux jumeaux, qui a été découvert à une quinzaine de mètres de la surface des pentes du Palatin, non loin du Tibre. Denys d’Halicarnasse, historien grec, contemporain d’Auguste l’avait évoquée dans ses Antiquités romaines. En l’honneur de Lupercus, dieu des troupeaux, les Romains y célébraient des fêtes chaque année au mois de février.

Et encore plus récemment, d’autres découvertes ont été faites, en 2019 : en s’appuyant sur les écrits de l’archéologue italien Giacomo Boni, au début du XXe siècle, des chercheurs et des archéologues ont mis à jour un tombeau souterrain dédié à Romulus : une chambre souterraine, un sarcophage en tuf d’ 1,40 m de long et vraisemblablement un autel.

Il y a fort à penser que les investigations archéologiques n’ont pas dit leur dernier mot quant au fondateur légendaire de Rome.

Avec des écrits très éloignés des faits, avec un Forum qui a effacé de nombreuses traces de la Rome royale, il est donc difficile de savoir si Romulus, au-delà de la légende, a été un personnage historique. L’archéologue Paolo Carafa, spécialiste de l’Antiquité romaine à l’université La Sapienza de Rome, dit ainsi justement : « le fait que Romulus ait existé ou pas n’est pas l’essentiel, ce qui importe c’est que cette figure soit considérée comme le point de départ choisi par les anciens pour marquer la naissance politique de la ville. »


Ce qu’en dit Tite-Live…
Quoniam gemini essent nec aetatis uerecundia discrimen facere posset, ut dii, quorum tutelae ea loca essent, auguriis legerent, qui nomen nouae urbi daret, qui conditam imperio regeret, Palatium Romulus, Remus Auentinum ad inaugurandum templa capiunt. Remo augurium uenisse fertur, sex uultures, iamque nuntiato augurio cum duplex numerus Romulo se ostendisset, utrumque regem sua multitudo consalutauerat: tempore illi praecepto, at hi numero auium regnum trahebant.

Tite-Live,Ab Urbe condita, I, 2, 6-7


Ils étaient jumeaux, et la prérogative de l’âge ne pouvait décider entre eux : ils remettent donc aux divinités tutélaires de ces lieux le soin de désigner, par des augures, celui qui devait donner son nom et des lois à la nouvelle ville, et se retirent, Romulus sur le mont Palatin, Rémus sur l’Aventin, pour y tracer l’enceinte augurale. Le premier augure fut, dit-on, pour Rémus : c’étaient six vautours ; il venait de l’annoncer, lorsque Romulus en vit le double, et chacun fut salué roi par les siens ; les uns tiraient leur droit de la priorité, les autres du nombre des oiseaux. Une querelle s’ensuivit, que leur colère fit dégénérer en combat sanglant ; frappé dans la mêlée, Rémus tomba mort.