Des astronomes ont obtenu la première image d’un disque de poussière encerclant de près une étoile massive récemment née, apportant la preuve directe que les étoiles massives se forment de la même manière que leurs s½urs plus petites. Cette découverte, réalisée grâce à plusieurs télescopes de l’ESO, est présentée cette semaine dans un article de la revue Nature.
"Nos observations révèlent un disque environnant une jeune étoile massive à l'état embryonnaire, qui est maintenant totalement formée" déclare Stefan Kraus, le responsable de cette étude. "Certains diront que le bébé est sur le point d’être mis au monde".
L’équipe d’astronomes a observé un objet connu sous le nom énigmatique d’IRAS 13481-6124. La jeune étoile centrale, qui est toujours entourée par son cocon prénatal, a une masse d’environ 20 fois celle du Soleil et un rayon cinq fois plus grand. Elle se situe dans la constellation du Centaure, à 10 000 années-lumière de la Terre.
A partir d’images d’archives obtenues par le satellite Spitzer de la NASA et par des observations effectuées avec le Télescope submillimétrique APEX de 12 mètres de diamètre, les astronomes ont découvert la présence d’une trace d’éjection de matière.
"De tels jets sont couramment observés autour de jeunes étoiles de faible masse et indiquent généralement la présence d’un disque," précise Stefan Kraus.
Les disques circumstellaires sont des éléments essentiels dans le processus de formation des étoiles de faible masse comme notre Soleil. Cependant, nous ne savons pas si ces disques sont également présents durant la formation des étoiles de masse supérieure à dix fois celle du Soleil, car le rayonnement puissant qu’elles émettent pourrait empêcher la matière de tomber sur l’étoile. Il a ainsi été proposé que les étoiles massives pourraient se former lorsque des étoiles plus petites fusionnent.
Afin de découvrir et de comprendre les propriétés de ce disque, les astronomes ont utilisé le mode interférométrique du VLT, le VLTI (Very Large Telescope Interferometer), de l’ESO. En combinant la lumière de trois des télescopes auxiliaires de 1,80 mètre du VLTI avec l’instrument AMBER, cet équipement permet aux astronomes d’observer des détails aussi précis que s’ils avaient un télescope avec un miroir de 85 mètres de diamètre. La résolution obtenue correspond à 2,4 millisecondes d’angle, ce qui équivaudrait à distinguer la tête d’une vis de la station spatiale internationale, ou encore à plus de dix fois la résolution atteinte avec les télescopes spatiaux actuels observant dans le visible
Avec cette capacité exceptionnelle, complétée par des observations réalisées avec un autre télescope de l’ESO, le télescope NTT de 3,58 mètres de diamètre à La Silla, Stefan Kraus et ses collègues ont été capables de détecter un disque autour d’IRAS 13481-6124.
"C’est la première fois que nous pouvons prendre une image de la région interne d’un disque autour d’une étoile massive" précise Stefan Kraus "Nos observations montrent que la formation se passe de la même manière pour toutes les étoiles, quelle que soit leur masse."
Les astronomes ont déterminé que le système était âgé de 60 000 années-lumière et que l’étoile avait atteint sa masse finale. A cause de la lumière intense de l’étoile qui est 30 000 fois plus lumineuse que le Soleil, le disque va bientôt s’évaporer. Ce disque évasé s’étend sur 130 fois la distance Terre-Soleil (130 Unités Astronomiques) et a une masse similaire à celle de l’étoile, soit environ vingt fois celle du Soleil. De plus, les parties internes du disque apparaissent dépourvues de poussière.
"De prochaines observations avec ALMA (Atacama Large Millimeter/submillimeter Array), en cours de construction au Chili, pourraient fournir plus d’informations sur ces parties internes et nous permettre de mieux comprendre comment les étoiles massives "nouveaux nés" deviennent grosses," conclut Stefan Kraus.