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19
Déc 2010

Hypatie

Posté dans Bureau des Archives - Source: http://wapedia.mobi/...

Hypatie
Hypatie d'Alexandrie (en grec ancien Ὑπατία / Hypatia, v. 370 – 415 après J.C.) est une mathématicienne et une philosophe grecque.
Son père Théon d'Alexandrie, dernier directeur du Musée d'Alexandrie, est éditeur et commentateur de textes mathématiques. Il éduque sa fille en l'initiant à la mathématique et à la philosophie. Elle a peut-être dirigé l'école néoplatonicienne d'Alexandrie. Nous connaissons la figure d’Hypatie uniquement grâce aux lettres de Synésios de Cyrène, son ancien élève, qui a été évêque de Ptolémaïs. Il la décrit extrêmement belle et intelligente.

Hypatie fait ses études de sciences, philosophie et éloquence à Athènes. Elle travaille aussi dans le domaine de l'astronomie et de la philosophie. Elle écrit des commentaires sur L'Arithmétique de Diophante, sur Les Coniques d'Apollonius de Perga et sur Les Tables de Ptolémée. Ses exposés publics à Alexandrie, où elle défend les thèses néoplatoniciennes (sans l'influence de Plotin) lui valent une grande renommée. Elle écrit un « canon astronomique » et sait fabriquer des appareils scientifiques (planisphère, hydroscope ainsi qu'en témoignent les lettres et ouvrages de son disciple Synésius de Cyrène. Cependant aucun de ses travaux ne nous est parvenu, en particulier à cause de l'incendie final de la Bibliothèque d'Alexandrie ; cela explique sa faible notoriété.

Synésios de Cyrèn, un de ses élèves (avant 395) qui était aussi son ami et qui devint évêque de Ptolémaïs, la loue dans ses lettres (en 404-407) pour sa grâce (elle reste vierge d'après la légende) et lui demande des conseils pour construire un hydromètre,un astrolabe ou pour tracer des cartes géographiques. Il lui a écrit : « C'est pour vous seule que je négligerais ma patrie ; et si jamais je puis la quitter, ce ne sera que pour aller auprès de vous » ; et ailleurs : « Quand bien même nul souvenir ne resterait aux morts dans les enfers, moi je m'y souviendrais de ma chère Hypatie » (Lettre 24). Dans une lettre à son père, il dit d'elle : « La philosophe si chère à Dieu et que nous ne saurions trop vénérer » (Lettre 17).

L'historien chrétien Socrate le Scolastique rapporte dans son Histoire ecclésiastique (vers 440) : « Il y avait à Alexandrie une femme du nom d’Hypatie ; c’était la fille du philosophe Théon ; elle était parvenue à un tel degré de culture qu’elle surpassait sur ce point les philosophes, qu’elle prit la succession de l’école platonicienne à la suite de Plotin, et qu’elle dispensait toutes les connaissances philosophiques à qui voulait ; c’est pourquoi ceux qui, partout, voulaient faire de la philosophie, accouraient auprès d’elle. La fière franchise qu’elle avait en outre du fait de son éducation faisait qu’elle affrontait en face à face avec sang-froid même les gouvernants. Et elle n’avait pas la moindre honte à se trouver au milieu des hommes ; car du fait de sa maîtrise supérieure, c’étaient plutôt eux qui étaient saisis de honte et de crainte face à elle. »

Hypatie n'est pas une cynique parlant dans les rues, elle dispense un enseignement public, aux frais ou au service de l'Etat, dans les années 390, à Alexandrie. Elle explique « Platon ou Aristote ou tout autre philosophe » (selon Damascios). L'assistance à ses cours est libre. D'autre part, Hypatie donne sans doute des séances privées (hidia), en cénacles, et peut-être chez elle, auxquelles assistaient Synésios et ses condisciples. Cela explique que Cyrille, en poste depuis 412, ne se soit rendu compte qu'en 414 ou 415 de la popularité d'Hypatie. Elle porte sur elle « l'anneau de continence » (selon Damascios). Elle pratique la théurgie.

A la fin du IVe siècle, la situation entre les païens, les juifs et les chrétiens est très tendue à Alexandrie. Le patriarche Cyrille, futur docteur de l’Eglise, après avoir chassé les juifs de la ville et transformé les synagogues en églises, entre en conflit avec Oreste, le préfet romain de la ville, qui essaye de limiter les ingérences de la communauté chrétienne dans le pouvoir civile. Lorsqu'un moine lié à Cyrille, ayant tenté d’assassiner Oreste, est capturé et exécuté, le patriarche le présente comme un martyre de la foi, en faisant empirer le climat de haine présent dans la ville.Pour une femme atypique comme Hypatie, indépendante, cultivée, engagée dans la recherche scientifique et très estimée par le préfet de la ville, Alexandrie devient bientôt un lieu très peu sûr. Les chrétiens et Cyrille commencent en effet à s’inquiéter de l’influence que cette femme, philosophe et païenne, peut avoir sur Oreste.


Le meurtre d'Hypatie

En mars 415, à 45 ans, elle meurt lapidée par des chrétiens. Selon la thèse de Socrate le Scolastique (vers 440), les chrétiens lui reprochaient d'empêcher la réconciliation entre le patriarcheCyrille d'Alexandrie et le préfet romain Oreste à la suite de conflits sanglants entre diverses communautés religieuses d'Alexandrie. Selon la thèse du philosophe néoplatonicien Damascios (en 495), l'évêque aurait découvert par hasard, en passant devant chez Hypatie et en voyant la foule qui s'y pressait, la popularité de la philosophe. Toujours est-il qu'elle est arrachée à sa voiture, entraînée dans une église, siège patriarcal, consacrée à saint Michel, appelée le Cæsareum quand l'édifice était le centre du culte impérial à Alexandrie. Hypatie est déshabillée, tuée à coups de tessons, mise en pièces. Ses restes sont promenés par les rues et brûlés.

D'après Socrate le Scolastique, vers 440 : « Contre elle alors s’arma la jalousie ; comme en effet elle commençait à rencontrer assez souvent Oreste, cela déclencha contre elle une calomnie chez le peuple des chrétiens, selon laquelle elle était bien celle qui empêchait des relations amicales entre Oreste et l’évêque. Et donc des hommes excités, à la tête desquels se trouvait un certain Pierre le lecteur, montent un complot contre elle et guettent Hypatie qui rentrait chez elle : la jetant hors de son siège, ils la traînent à l’église qu’on appelait le Césareum, et l’ayant dépouillée de son vêtement, ils la frappèrent à coups de tessons ; l’ayant systématiquement mise en pièces, ils chargèrent ses membres jusqu’en haut du Cinarôn et les anéantirent par le feu. Ce qui ne fut pas sans porter atteinte à l’image de Cyrille et de l’Église d’Alexandrie ; car c’était tout à fait gênant, de la part de ceux qui se réclamaient du Christ que des meurtres, des bagarres et autres actes semblables soient cautionnés par le patriarche. Et cela eut lieu la quatrième année de l’épiscopat de Cyrille, la dixième année du règne d’Honorius, la sixième du règne de , Théodose,au mois de mars, pendant le Carême. »

D'après Jean de Nikiou (Nicée), au VIIème sicèle : « En ces temps apparut une femme philosophe, une païenne nommée Hypatie, et elle se consacrait à plein temps à la magie [théurgie, selon Michel Tardieu], aux astrolabes et aux instruments de musique, et elle ensorcela beaucoup de gens par ses dons sataniques. Et le gouverneur de la cité l'honorait excessivement; en effet, elle l'avait ensorcelé par sa magie. Et il cessa d'aller à l'église comme c'était son habitude.... Une multitude de croyants s'assembla guidée par Pierre le magistrat – lequel était sous tous aspects un parfait croyant en Jésus-Christ – et ils entreprirent de trouver cette femme païenne qui avait ensorcelé le peuple de la cité et le préfet par ses sortilèges. Et quand ils apprirent où elle était, ils la trouvèrent assise et l'ayant arrachée à son siège, ils la trainèrent jusqu'à la grande église appelée Césarion. On était dans les jours de jeûne. Et ils déchirèrent ses vêtements et la firent traîner (derrière un char) dans les rues de la ville jusqu'à ce qu'elle mourût. Et ils la transportèrent à un endroit nommé Cinaron où ils brûlèrent son corps. Et tous les gens autour du patriarche Cyrille l'appelèrent « le nouveau Théophile », car il avait détruit les derniers restes d'idolâtrie dans la cité. »


Postérité

A partir de la Renaissance, Hypatie est considérée comme une martyre de la pensée scientifique et de la liberté scientifique. L’historien Edward Gibbon a même définit sa mort comme une « tache indélébile ». Elle a été célébrée dans la littérature par des poètes comme Leconte de Lisle, on l’a fait apparaître dans plusieurs romans qui se déroulent au IVe siècle, et récemment, sa vie et sa mort sont devenues le sujet d’Agora, le dernier film d’Alejandro Amenabar.

Hypatie est l'héroïne idéale. Elle était charismatique ; elle mourut horriblement ; elle fut au centre d'un jeu compliqué de tensions politiques et religieuses ; et - la qualification la plus importante pour le statut de héros - en fin de compte nous savons très peu sur elle de façon claire et certaine. Une étoile qui brille, certes, mais vue à travers les brumes du temps et de l'oubli. Nos incertitudes invitent la construction d'une héroïne. L'un des principaux thèmes des études récentes sur Hypatie est précisément la diversité des interprétations de son histoire. Un livre italien, d'Elena Gajeri, portant le titre Ipazia, un mito letterario - « Hypatie, un mythe littéraire » suggère qu'Hypatie, telle que nous la connaissons, est une construction de l'imaginaire plutôt qu'une réalité de l'histoire.

Déjà dans l'antiquité tardive elle était une héroïne païenne pour avoir été massacrée par les chrétiens, ou encore une héroïne des ariens pour avoir été massacrée par les orthodoxes, ou encore une héroïne des chrétiens de Constantinople pour avoir été massacrée par les chrétiens intempérants d'Alexandrie. Plus récemment elle s'est vue traiter d’héroïne anticléricale, victime de la hiérarchie ; héroïne protestante, victime de l'église catholique ; héroïne du romantisme hellénisant, victime de l'abandon par l'Occident de sa culture hellénique ; héroïne du positivisme, victime de la conquête de la science par la religion ; et, tout dernièrement, héroïne du féminisme, victime de la misogynie chrétienne. Femme polyvalente !

Il y a donc, chez Hypatie, tous les éléments idéaux pour une histoire captivante : il y a le fait exotique, dans l'antiquité, d'une femme mathématicienne et philosophe ; il y a son charisme indéniable ; il y a l'élément érotique fourni par sa beauté et par sa virginité ; il y a le jeu imprévisible des forces politiques et religieuses dans une ville qui a toujours connu la violence ; il y a la cruauté extraordinaire de son assassinat ; et, en arrière-plan, le sentiment profond d'un changement inexorable d'ère historique. De plus il y a notre manque d'informations claires et précises sur elle, ce qui permet aux fabricants de légendes de remplir les lacunes comme ils veulent.