UN PEU DE TOUT... BEAUCOUP DE RIEN
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Epicure -
L'épicurisme est souvent réduit à deux idées : une morale hédoniste et une cosmologie matérialiste. La seconde stipule que tous les objets et êtres vivants sont constitués par des combinaisons d'atomes de matière ; quant à la première, elle fait de la recherche du plaisir la fin de toute activité. De loin, l'épicurisme apparaît ainsi comme une forme d'athéisme.

Cette vision est toutefois trompeuse. D'abord, la recherche des plaisirs dans l'épicurisme ne ressemble en rien à la concupiscence. L'épicurien est un hédoniste sobre et vertueux. Le bonheur consiste même dans l'ataraxie, c'est-à-dire l'absence de désir ou de crainte. Ensuite, il ne faut pas oublier que l'épicurien croit aux dieux. Certes, ces derniers étant indifférents aux affaires humaines, il ne s'adresse pas à eux pour les apaiser ou pour en obtenir quelques grâces, mais il cherche à être comme eux, en état de parfaite ataraxie. En offrant une juste représentation de l'univers, la physique épicurienne est justement ce qui permet d'atteindre cet état. Enfin, comme essaie de le montrer Renée Koch dans ce livre, l'épicurisme anticipe tous les traits d'une religion au sens moderne du terme.

Dans les religions de l'Antiquité, le rite est plus important que la croyance. L'épicurisme, quant à lui, fonda ses rites sur des croyances. Il attribuait ses dogmes, son organisation, ses pratiques cultuelles à un fondateur charismatique (Epicure) qui en incarnait la réalisation parfaite. Ses textes étaient lus et vénérés. Ils instauraient, par-delà les pratiques variables du culte, la fixité d'une doctrine et rendaient possible un sectarisme très nouveau dans l'Antiquité. L'épicurisme est ainsi l'un des premiers mouvements à faire de la relation aux dieux une affaire de croyance. En l'occurrence, il érigea en dogme l'anthropomorphisme des dieux grecs et proposa à ses adeptes d'atteindre l'égalité avec ces derniers. Aussi R. Koch peut-elle affirmer qu'« il est bien possible que notre idée actuelle de la religion comme ensemble de croyances et de représentations reçues pour vérités par les uns, pour crédulité par les autres, ait connu dans l'épicurisme sa première réalisation ». Décidément, on est loin de l'athéisme.

" Commence par te persuader qu'un dieu est un vivant immortel et bienheureux, te conformant en cela à la notion commune qui en est tracée en nous. N'attribue jamais à un dieu rien qui soit en opposition avec l'immortalité ni en désaccord avec la béatitude; mais regarde-le toujours comme possédant tout ce que tu trouveras capable d'assurer son immortalité et sa béatitude. Car les dieux existent, attendu que la connaissance qu'on en a est évidente. Mais, quant à leur nature, ils ne sont pas tel que la foule le croit. Et celui-là n'est pas impie qui nie les dieux de la foule, c'est celui qui attribue aux dieux ce que leur prêtent les opinions de la foule. Car les affirmations de la foule sur les dieux ne sont pas des prénotions, mais bien des présomptions fausses. Et ces présomptions fausses font que les dieux sont censés être pour les méchants la source des plus grands maux comme, d'autre part, pour les bons la source des plus grands biens. Mais la multitude incapable de se déprendre de ce qui est chez elle et à ses yeux le propre de la vertu n'accepte que les Dieux conformes à cet idéal et regarde comme absurde tout ce qui s'en écarte. "

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